About reggae music…

Filed Under (Articles) by zalemmm on 09-05-2009

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Il y a plusieurs polémiques autour du reggae qui ont fait couler de l’encre et sur lesquelles j’avais depuis longtemps envie de mettre mon grain de sel sans avoir le temps ni l’envie de débattre. En voici une qui me tient à coeur, ce sera l’occasion de poursuivre une réflexion sur la question du racisme que j’ai amorcée un peu à propos de Durban II:

Eek-A-Mouse avait soulevé une question il y a quelques temps qui a mon sens devrait être entendue, malgré le peu de crédit qu’on lui a accordé en lui collant direct l’horrible étiquette de « raciste » (vous avez remarqué la facilité déconcertante avec laquelle les blancs emploient ce terme destructeur envers les noirs de nos jours?)

Petit rappel des faits (en fait plutôt un point de vue subjectif des faits):

En juin 2008, L’artiste vétéran Eek-a-Mouse a été l’auteur de propos à connotations racistes lors de sa conférence de presse tenue au Carifest CARES (Compassionate Artists Recognizing Entertainment Solutions). répondant à une question de l’assemblée il s’est lancé dans une violente diatribe anti « white people » où il a expliqué que le reggae était tenu par les « blancs », citant sans distinction Sean Paul, Shaggy, Matisayhu, Ace of base, Bob Marley. Ces personnes là ne veulent pas que les noirs réussissent dans le reggae, explique-t-il, les blancs récupèrent de l’argent du reggae et moi, rien du tout.

Des propos desquels l’organisation du Carifest a tenu à se démarquer, regrettant le dérapage d’Eek-a-Mouse visiblement aigri de la tournure qu’à pris sa carrière.

source: http://fr.wikipedia.org/wiki/Eek-A-Mouse

Peut être qu’il s’est exprimé maladroitement mais il y a là un vrai problème, Natural Black l’avait lui aussi identifié à sa manière, dans une interview au magazine « Natty Dread », lui valant à lui aussi le titre honorifique de « raciste antiblanc ».

Je pense pourtant que c’est une question majeure à laquelle il faut réfléchir avant de commencer à insulter tout le monde.

Tout d’abord le reggae a ses racines en Jamaïque. Il est devenu l’instrument propice à faire entendre la voix d’un peuple bien particulier: celui des descendants d’esclaves, de gens qui ont été arraché à leur terre ancestrale pour servir une puissance étrangère. Je ne dis pas que cette musique est la propriété exclusive de ce peuple. Grâce à Dieu elle a conquis le coeur de toutes les nations, et si c’est le cas c’est parce que tout les peuples vivent, à leur niveau, l’esclavage et la soumission à une puissance étrangère car mondialisée, et peuvent se reconnaitre quelque part dans ce discours.
Mais je pense qu’il est essentiel d’accorder le maximum de crédit à ceux qui sont à l’origine de cette musique, et je crois que le système de l’industrie musicale ne leur rend pas justice.

Personnellement je ne suis pas choqué par ces propos. Je trouve normal que quelqu’un comme Eek-A-Mouse dont on sait le talent et l’apport artistique phénoménal dont il a gratifié le reggae depuis des décennies, soit frustré de voir qu’il n’apparait qu’au second plan sur la scène internationale, derrière des gens qui ont été volontairement mis en avant par le système consumériste.

Évidemment il cite Bob Marley dans le lot, et je comprends que ça puisse en faire tiquer plus d’un.
Pourtant réfléchissez deux secondes. Vous croyez que le talent de Bob a été la seule cause de son succès? Vous croyez que Babylone s’intéresse sincèrement au talent des artistes qu’il met en avant?

Loin de moi l’idée de remettre en cause la puissance du message de Bob Marley. Sa musique est la la beauté à l’état pur. Mais je pense que son métissage n’est pas étranger au fait que le système l’ait choisi lui plutôt qu’un autre, pour incarner aux yeux de la planète la voix du tiers monde.
Le fait qu’il soit métis a longtemps servi à le faire passer étrangement pour plus « gentil », comparé à une face plus « sombre » incarnée par Peter Tosh (qui s’il était encore là aujourd’hui serait très probablement taxé lui aussi de méchant raciste, voire de terroriste).

Bon tout ça n’est pas non plus qu’une question de couleur. Le fait est aussi que le système préfère les artistes morts, parce qu’on est sûr qu’ils ne causeront plus de problèmes: évidemment ils sont plus là pour réagir à l’actualité, on peut leur faire dire ce qu’on veut. C’est d’ailleurs pour ça que Peter Tosh a pu émerger. Quand on tient des propos virulents contre le système, vaut mieux être mort, ça passe mieux.
Mais je n’ai pas l’impression que Bob Marley ait été moins virulent envers le système. Il a juste été propulsé dans une autre logique et un autre univers du fait de sa notoriété, qui ont pu l’amener à un discours plus imagé, mais pas plus consensuel.
Et le fait qu’il soit métis a permis d’autoriser les blancs bien pensants à y adhérer en entretenant en arrière plan un drôle de raisonnement manichéen entre l’idée qu’il y aurait de « gentils tiers-mondistes » tendant vers l’unification et le pardon, et d’autres plus roublards et revanchards, incorrigibles révolutionnaires ne voulant que faire couler le sang de la vengeance. C’est la dichotomie « bon nègre »/ »mauvais nègre » qui fait toujours partie qu’on le veuille ou non de l’idéologie de système, le bon étant celui qui pour ou contre son gré, sert d’alibi à l’ordre établi. En l’occurrence pour Bob Marley, il est clair que ce fut contre son gré (c’est entendu mais j’aime autant préciser sinon je vais me faire incendier!!).

Tout ça pour en arriver a notre époque et constater quoi: que les artistes de reggae qui sont aujourd’hui mis en avant par l’industrie du disque au niveau international sont souvent, si ce n’est blancs ou métis, en tout cas plus « occidentalisés » et surtout, le comble, pas originaires de Jamaïque, ni même des îles alentours.

Bon là c’est pareil je risque de pas me faire que des amis mais comprenez que ce n’est pas pour descendre quelque artiste que ce soit: comment se fait-il que les têtes d’affiches, les artistes actuels que tout le monde connait sans s’intéresser particulièrement au reggae soient Groundation ou Patrice? Ok ils font du son de qualité, ok ils méritent leur succès. Mais je peux comprendre que vu de Jamaïque, certains aient l’impression de se faire voler la vedette.

Prenons l’exemple de Matisyahu, justement présent lors de l’intervention d’Eek-A-Mouse. Ce gars a l’air très intéressant, le problème c’est qu’à l’époque de ses premiers albums, ma boite mail était matraquée de beaux messages promotionnel super design me faisant la pub de ce rabbin qui fait du reggae. Comme je suis un peu rebelle, j’ai tendance à pas trop écouter ce qu’on me suggère d’écouter, surtout à coup de publicité intensive. Du coup j’ai laissé pisser. Depuis j’ai écouté un peu ce qu’il faisait et je trouve ça tout à fait sympathique, mais ça illustre parfaitement mon propos:
Un occidental qui arrive dans le reggae avec un concept original, s’il sait en plus faire de la musique, c’est le succès direct garanti. Suffit de savoir parler aux nostalgiques du bon vieux roots qui aiment bien planer et qui pensent que Bob est vraiment un mec « trop peace ».

Mais pendant ce temps, toute une scène d’artistes tout aussi, si ce n’est plus intéressants, restent dans l’ombre, à patienter des journées entières devant des studios dans l’espoir de se faire entendre, et si par miracle ils arrivent à sortir un ou deux singles, ils ne seront écoutés que par un public très averti, ce qui est dommage et pour le public, et surtout pour l’artiste qui continue à galérer des années avant de percer, déjà en Jamaïque, et si possible, mais faut pas trop rêver, à l’international.

On s’étonne ici que les artistes jamaïcains soient si productifs, tel un Sizzla qui tourne à 4-5 albums par an, et encore quand il est pas très en forme. Concrètement est ce qu’ils ont d’autre choix que de bosser comme des malades pour se faire entendre? Est ce que le système va aller les chercher comme ça au fin fond du ghetto et envoyer des mails à tout le monde pour dire à quel point c’est terrible ce qu’ils font? C’est là le souci que Natural Black pointait du doigt dans son interview à Natty Dread: le redoublement d’efforts et les concessions que bon gré mal gré l’artiste rasta sincère issu d’un milieu pauvre doit faire pour se faire une place.

Et là je vais prendre l’exemple de Perfect, car à la limite je veux bien qu’un Norris Man ou un Terror Fabulous soient plus hermétiques au grand public. Mais PERFECT bordel !!! Il a produit 2 albums et s’apprête à en sortir un 3e. Le 2ème est une pure merveille, démontrant tout l’éventail de ses performance vocales, très marquées soul, ce qui devrait à coup sûr, séduire le public occidental. Pour moi Perfect est loin devant Patrice, et il fait en preuve d’un même éclectisme en explorant des horizons très vastes, avec des envolées lyriques tellement plus séduisantes. Ce gars devrait déjà remplir des zéniths partout où il va. Ben Harper a bien été propulsé dès son premier album, non? Au lieu de ça il fait la première parties de Gyptian à l’Antirouille. Bon quelque part tant mieux pour moi et les quelques fans avertis, c’est plus kiffant dans une petite salle et l’artiste au milieu du public, mais je trouve que Perfect mérite une bien plus large audience, et c’est juste un exemple, que dire de Chezidek dont la voix magique fait vibrer l’âme et qui n’a pas l’air d’être souvent en tournée à travers le monde… après c’est peut être un choix personnel?

Sérieux c’est du racisme antiblanc de penser qu’un artiste issu du tiers monde a moins de chances de réussir et d’être reconnu internationalement qu’un Américain ou un Allemand? Je pense que c’est une réalité qu’il ne faut pas chercher à voiler. Bref peut être qu’Eek-A-Mouse a un peu trop racialisé le débat, mais peut être que c’est ses détracteurs qui ont fait monter la sauce. Quoi qu’il en soit il y a une certaine vérité qui a été exprimé puis complètement étouffée par l’indignation antiraciste – antiracisme bien pensant des blancs qui croient bien faire (et qui ressemble étrangement à celui qui veut clouer le bec à un Dieudonné).

Il y a dans cette île des Caraïbes une tradition phénoménale du chant et du travail des sonorités vocales qui font des jamaïquains certainement les meilleurs chanteurs du monde. Ce n’est pas pour rabaisser les autres que je dis ça, c’est la constatation d’une suprématie culturelle ou technique héritée d’une tradition, comme on peut prétendre que les français font le meilleur vin. Ca n’empêche pas les autres d’en faire aussi, ça ne les empêche pas de dépasser aussi parfois leur modèle, mais il est essentiel que le crédit et la rétribution aille en priorité à ceux qui ont développés les connaissances propres à faire du « bon vin ».

Tout ça pour dire Groundation et compagnie, ok, pas de problème, mais n’oubliez pas d’où vient le reggae, pensez à aller à la source, à soutenir et aller aux concerts des « original rastamans », et puis surtout les « youths », parce que moi aussi j’adore le vieux roots, mais on a la chance de vivre une époque où une jeune génération d’artistes fait entendre un discours très pertinent, ce serait con de passer à côté.

Et surtout, ne cédez pas à la criminalisation des artistes jamaïcains qui on réussi à percer un peu trop aux yeux du système, et qui sont maintenant taxés de méchants homophobes sexistes. Je ne soutiens pas les propos il est vrai très violents que peuvent avoir certains djs à l’encontre des homosexuels, mais je comprends que Sizzla n’ait pas envie de s’excuser auprès des tenants de la pensée unique… »Nah apologize!! »
Si Sizzla ou Capleton sont homophobes, essayez de comprendre pourquoi avant de donner des leçons. Examinez le contexte, et lancez le débat avant quoi que ce soit. La censure ne fait qu’aggraver les rapports de forces. Quel crédit peuvent accorder des rastas à des gens qui arrivent tels les colons qu’ils ont connu pour leur dire ce qu’il faut penser et comment se comporter?

Et puis si Sizzla, Capleton ou Anthony B ont percé mondialement, c’est qu’ils ont fait à moment donné des concessions artistiques, sans jamais abandonner complètement leur discours rasta, mais en cédant au modèle américain des gangsta rappeurs et à la vulgarité ambiante promue par MTV. Forcément s’il n’y a pas d’autre moyen pour percer à l’international, on va passer à côté de nombreux artistes dont le message n’a jamais basculé dans l’appel à la violence et la vulgarité, ni pour booster une carrière ni pour se faire de la caillasse, tels que Lutan Fyah, Perfect, Everton Blender, Louie Culture, Ginjah, Chezidek , et quantités d’autres…

Voilà pourquoi je diffuse en priorité ces artistes qui gardent une certaine intégrité , et j’aimerais qu’il soient mieux connus du grand public, sans avoir à passer par le même chemin que leurs aînés, même si je ne jette pas la pierre à ceux qui ont choisi d’autres voies: ils ont fait ce qu’ils ont pu pour se faire entendre, et ça valait le coup, car ils avaient quelque chose d’important à faire entendre au delà de l’image bling bling à laquelle ils ont pu coller de temps à autre… Et puis nous sommes mal placés pour juger, ici en occident, là ou a été fomenté cette déchéance sociale, la destruction et l’inversion de toutes les valeurs traditionnelles et morales, dont le tiers monde a été le premier à faire les frais.

« There will be no peace until there’s equal rights and justice »

Donc je réïtère: le racisme que je condamne est celui qui considère une race supérieure à une autre.
Par contre si des injustices sociales prennent une dimension raciale, c’est un état de fait dû à l’Histoire et je trouve intolérable de retourner l’accusation de racisme à des gens qui se sentent à juste titre floués par le système.

Après, allez savoir, peut être qu’Eek-A-Mouse est véritablement un gros méchant raciste qui déteste les blancs, je sais pas, je ne le connais pas assez… en plus d’un gros pervers, tiens qu’est devenu l’accusation qu’on portait sur lui l’été dernier de viol et séquestration? vu que j’ai pas entendu dire qu’il était en prison je suppose que les accusations étaient infondées… en général les médias sont prompt à relayer ce genre de rumeur mais quand il s’agit de rectifier… bref. En tout cas si quelqu’un en sait plus, ça m’intéresse… je vais commencer à me foutre grave dans la merde, d’abord en soutenant Dieudonné, puis Ahmadinejad, manquerait plus qu’un violeur!!
Mais bon je pense que vous comprenez le sens du raisonnement.

Free up your mind from Babylon ideology… « cause we no want no devil philosophy! »

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